Passage émotif au Québec pour Denis Villeneuve et Tanya Lapointe
Marie-Josee R RoyLe couple formé de Denis Villeneuve et Tanya Lapointe a évidemment beaucoup fait tourner les têtes au Gala Québec Cinéma, dimanche.
Présents à l’événement en raison de l’hommage qui était rendu au cinéaste en cours de soirée, ce dernier et sa conjointe, qui travaille avec lui notamment comme productrice, ont été accessibles et d’une générosité sincère avec leurs collègues artistes et avec les journalistes, prenant le temps d’échanger un mot avec chacun.
Tanya Lapointe, qui a autrefois été journaliste culturelle pendant 15 ans (et 10 ans à Montréal) à Radio-Canada, jusqu’en 2016, était d’ailleurs émue de constater qu’elle assistait pour la première fois au Gala Québec Cinéma en tant que spectatrice, et non en tant que reporter, les projets américains de Denis Villeneuve et la pandémie l’ayant nécessairement un peu éloignée du milieu cinématographique d’ici.
«Ça me rendait un peu nostalgique, ce soir, de repenser aux galas auxquels j’ai assisté comme journaliste», a confié Tanya Lapointe à Hollywood PQ. «C’est chouette, parce qu’on connaît tout le monde! C’est comme revenir dans la famille. La pandémie a fait qu’il y a des gens qu’on n’a pas vus depuis 5 ans. On n’avait pas eu d’opportunités de se croiser, de se voir « en vrai ». Juste en faisant les photos, en entrant, je pense que j’ai vu 40 personnes que je n’avais pas vues depuis vraiment très longtemps!»
L’occasion était belle de demander à Tanya Lapointe si elle s’ennuie de son rôle de journaliste. Pas spécialement, a-t-elle laissé entendre.
«J’ai adoré ce que j’ai fait, mais ce n’est pas facile comme travail, de durer dans le métier…»
Or, la profession «fait encore partie de [son] ADN», reconnaît-elle. La communicatrice a entre autres mis ses réflexes journalistiques à profit en concevant les livres documentant les secrets de production des derniers films de son partenaire (The Art and Soul of Dune, tome 1 et 2, The Art and Soul of Blade Runner 2049, The Art and Science of Arrival).
«J’ai toujours aimé interviewer les gens pour comprendre leur processus de création. Maintenant, j’ai les deux pieds dedans. J’ai des accès auxquels je n’aurais jamais pu rêver. Et c’est intéressant, parce que, quand j’ai commencé à écrire ces livres-là, c’était pour moi une façon de redonner, c’était ma curiosité que je pouvais assouvir et partager avec les autres…»
Également réalisatrice, Tanya Lapointe lançait en 2020 le documentaire Lafortune en papier, un portrait touchant du regretté animateur Claude Lafortune, qui a fait rêver tant de générations d’enfants avec ses bricolages au petit écran. L’aventure Dune l’ayant beaucoup accaparée dans les dernières années, la dame mijote néanmoins d’autres projets de documentaires, à l’état embryonnaire pour l’instant.
«J’adore travailler avec Denis et on va continuer de travailler ensemble sur ses prochains films, mais j’aime avoir mes projets, aussi. J’ai quelques collaborations, et on va voir si ça va évoluer vers quelque chose de concret», a mentionné celle qui allie avec brio art et affaires, et qui dit ne pas s’inquiéter pour la vitalité de la culture québécoise.
«Il y a une multiplication des voix. On ne dort pas sur les mêmes histoires dans la nostalgie. Il faut embrasser et célébrer ça. Pour moi, c’est le plus important, de célébrer ce qu’on fait. Je suis allée voir des films québécois en salle, et les salles sont pleines! Je pense qu’il y a un appétit. Il faut juste s’assurer de soutenir ça et que ça soit plus visible. C’est sûr que je parle d’un point de vue d’ancienne journaliste culturelle, mais moi, c’était ça, mon désir : de faire connaître tout ce qui se fait de beau, parfois de controversé, qui fait réfléchir sur notre réalité à nous, au Québec.»
Denis Villeneuve très ému
Denis Villeneuve, de son côté, n’a pas caché avoir été très flatté par le coup de chapeau que lui a tendu l’organisme Québec Cinéma lors de la cérémonie de dimanche animée par Phil Roy. Tant en entrevue individuelle avec Hollywood PQ avant le gala qu’en mêlée de presse avec les journalistes après le segment de son hommage, le respecté réalisateur, bien qu’habitué au faste hollywoodien, a réitéré sa gratitude sentie.
«Cette idée qu’on ait envie de célébrer mon parcours au Québec a une signification profonde pour moi. Parce que je suis parti du Québec depuis plusieurs années, mais le Québec est encore en moi, et ça me fait plaisir qu’on le reconnaisse.»
Denis Villeneuve témoigne d’ailleurs très concrètement de son attachement pour la Belle Province et son septième art. En septembre, il effectuait un «don majeur» au Cinéma du Parc pour aider la restauration et le maintien des activités de l’institution. Plus tôt cette année, en juillet, il foulait le tapis rouge de la première du film 1995 et renouait avec enthousiaste avec ses anciens camarades de La course destination monde, qui avait révélé son talent dans les années 1990.
«Ce sont mes racines! J’aime le cinéma québécois. C’est un cinéma inspirant, dynamique, et c’est important pour moi de rester en lien avec lui.»
Dans ses remerciements, dimanche, Denis Villeneuve a ouvert une rare porte sur sa vie intime, en saluant chaleureusement sa conjointe, Tanya Lapointe, et ses trois enfants, Salomé, Sacha et Achille. Les deux premiers étaient d’ailleurs à ses côtés lors du gala.
«[Tanya], dans son métier, comme productrice, structure ma vie, mon horaire et mon travail, pour que j’arrive à accomplir tout ce que j’ai à faire. C’est quelqu’un qui me guide. C’est ma première conseillère, la première personne qui me lit. La personne qui m’endure, aussi, qui gère les crises! Quand les studios américains ont des problèmes, ils ne m’appellent pas, moi; ils appellent Tanya, parce qu’ils savent que ça va se régler! C’est mon roc, c’est ma solidité. C’est quelqu’un qui m’inspire beaucoup», a dépeint le créateur, avant d’enchaîner sur la raison pour laquelle il souhaitait également adresser de tels mots à ses enfants.
«J’ai toujours été très farouche par rapport à mon intimité. Mais des hommages comme ça arrivent une fois. Je me disais que, s’il y avait trois personnes que j’avais envie de remercier, c’est eux. Ils embrassent cette idée que leur père disparaisse pour plusieurs mois. Que notre relation n’ait pas été affectée par ça, c’est le plus gros cadeau que j’ai reçu, dans ma vie. J’avais envie de les honorer pour ça, ce soir.»
«Profondément touché» d’avoir été encensé par les acteurs et collègues de ses premiers films – Pascale Bussières, Alexis Martin (Un 32 août sur terre), Évelyne Brochu, Karine Vanasse (Polytechnique), Rémy Girard (Incendies), etc. –, Denis Villeneuve a évidemment été questionné, dimanche, sur son intention – ou pas – de revenir travailler au Québec.
Pour l’heure, l’homme continue de s’accomplir à l’étranger. Mais il ne dit pas «jamais»…
«Éventuellement, quand je ferai un projet un peu plus intimiste, je vais revenir ici, c’est sûr. J’y vais un film à la fois! Les films que je fais présentement demandent une grande énergie. Ce sont des films de longue haleine, qui demandent beaucoup de force intérieure. Éventuellement, je reviendrai peut-être à des films plus petits…»