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Gregory Charles livre un bouleversant témoignage sur le racisme
Crédit: Karine Paradis

Quand Gregory Charles parle son père plus grand que nature, Lennox Charles, décédé tragiquement en 2018, c’est impossible de ne pas être touché. Aussi fort que bon, cet homme continue de vivre par la parole de son célèbre fils, qui lui a d’ailleurs rendu hommage avec son plus récent album. Alors que depuis une dizaine de jours le monde se révolte contre le meurtre de Georges Floyd et tous ces autres Noir.e.s décédé.e.s injustement aux mains des services policiers à cause du profilage racial, la voix de Lennox résonne dans la tête du musicien, qui a partagé de sages paroles et un bouleversant témoignage sur le racisme.

Après être revenu sur la vidéo qui a permis à tous d’être témoins du terrible assassinat de cet Afro-américain, Gregory Charles a partagé ses sentiments. La colère, la peine, la peur. « J'ai pleuré, j'ai été rempli de colère et d'incompréhension. Je me suis senti dégoûté, impuissant, découragé. Étant le papa d'une petite fille caramel, je suis aussi inquiet. J'ai peur pour ma fille parce qu'elle a vu ces images et qu'elle ne pourra jamais les oublier. Et parce que je ne sais pas où vont mener les événements du moment », écrit-il en pensant à sa fillette de huit ans qu’il a eue avec son épouse, Nicole Collet.

À travers l’horreur, c’est donc les mots de son père qui reviennent en Gregory Charles. Né d’un père venant d’une plantation et devenu policier, Lennox rappelait à son fils qu’il « faut répondre à la violence par plus de courage et plus de compassion. » Et les bottines de cet homme qui a marché avec Martin Luther King durant le mouvement des droits civiques suivaient ses babines, comme le démontre l’artiste avec un exemple marquant pour témoigner du fait que le racisme n’a pas contaminé que les États-Unis, mais bien l’ensemble du monde.

« Au début des années 70, mes parents ont tenté de louer un appartement dans le quartier Ahuntsic. En voyant mon père, le propriétaire, un colosse un peu obtus, a dit à ma mère qu'il n'était pas question qu'il loue à un noir. Ma mère, blanche, du haut de ses 4 pieds onze pouces lui a dit sa façon de penser. Mon père l'a pris par la main, a remercié le propriétaire pour son temps et nous sommes partis », raconte-t-il. La vie a fait que, 15 ans plus tard, Lennox a soigné ce même homme lorsqu’il a été hospitalisé là où il travaillait : « J'avoue que je ne comprenais pas bien pourquoi mon père voulait aider, mais surtout servir un homme qui avait été si cruel avec lui, avec nous. J'entends sa réponse depuis quelques jours, dans ma tête. «Il souffre et il a besoin de réconfort. I will do for him what must be done and I will do it as well as I can [Je ferai pour lui ce qui doit être fait et je le ferai aussi bien que je le peux]». »

Cette anecdote aigre-douce, c’est une façon de nous rappeler que, nous aussi, on peut parfois ne pas faire preuve « de compassion et encore moins de courage. » « Ces autres officiers, c'est parfois nous. Noirs ou blancs, jeunes ou moins jeunes, on se campe parfois dans nos certitudes. On se donne des explications, des justifications courtes alors que les problèmes sont complexes et cruels. Il faut qu'on s'insurge, qu'on se soulève, qu'on refuse ce qui est inacceptable, ce qui est imbuvable », milite Gregory Charles en appelant à des manifestations pacifiques.

« Et il faut encore et toujours rêver d'un monde où nous sommes tous et toutes blancs ou noirs, jeunes ou vieux, hommes ou femmes, croyants ou non, influents ou non, libres parce que capables d'aimer les autres plus qu'on s'aime soi-même. C'est ça que j'entends mon père me dire depuis quelques jours, dans ma tête. Dans mon coeur. “Because that is how we love and how we win, son. [Parce que c’est comme ça qu’on aime et que c’est comme ça qu’on gagne, mon fils]” », conclut le multi-instrumentiste.

Frissons, larmes, espoir. C’est ce que Gregory Charles amène avec son message qui a été partagé près de 10 000 fois depuis sa publication, mercredi.

Si vous voulez prendre des actions concrètes pour militer contre le racisme systémique, vous pouvez aller manifester à Montréal ce dimanche, encourager l’achat auprès d’entreprises possédées par des personnes noires, donner à l’organisation Black Lives Matter, à la NAACP ou encore au Black Legal Action Centre (pour ne donner que quelques exemples), signer des pétitions demandant la justice pour les victimes comme Breonna Taylor et écouter des films, des séries ou des podcasts pour vous aider à saisir les enjeux.

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