Dans le cadre du Festival du nouveau cinéma, qui se tient à Montréal du 9 au 20 octobre, André Forcier a présenté en grande première son tout nouveau film, Les fleurs oubliées. Le cinéaste est par ailleurs à l'honneur cette année dans la programmation du festival, puisque deux de ses plus grandes œuvres, L'eau chaude, l'eau frette (1977) et Le Vent du Wyoming (1994), seront projetées, respectivement le 17 et le 19 octobre.

Avec Les fleurs oubliées, le réalisateur nous plonge dans le réalisme magique avec entre autres la présence du frère Marie-Victorin, décédé en 1944 et réincarné ici dans une version libidineuse et plutôt alcoolo, interprétée avec brio par Yves Jacques. Le saint homme, qu'on retrouve amoureux fou de sa contemporaine, la naturaliste Marcelle Gauvreau (Mylène Mackay), ressuscite ainsi pour léguer à Albert Payette, un apiculteur et producteur d'hydromel joué par Roy Dupuis, sa bible, La Flore laurentienne, qui réfère à toutes ces plantes d'ici tombées dans l'oubli, de même que des « graines cosmiques », qui produiront des plantes mellifères aux allures dignes d'un décor de rave et dont découlera un alcool fantasmagorique.

À cet univers fantastique s'oppose la triste réalité de Transgénia, producteur du pesticide destructeur Super Turnup, une référence (pas voilée pour deux sous) à Monsanto et au Roundup. Après le film, Forcier a même raconté sur la scène du cinéma Impérial qu'il avait demandé à son avocate s'il pouvait utiliser dans son film le nom de la multinationale responsable de la mort de la biodiversité dans une multitude de pays. Avec Juliette Gosselin dans la peau d'une jeune mère journaliste écomilitante qui se bat contre l'introduction du pesticide dans les champs de maïs du Québec, le cinéaste navigue à merveille entre la triste réalité environnementale et la fantaisie pure née de l'arrivée sur Terre de Marie-Victorin, tout en surfant sur la parodie avec l'agriculteur incarné par Gaston Lepage, les travailleurs mexicains et le représentant de Transgénia campé par Donald Pilon, qui nous font retrouver la signature comique de Forcier au travers de cette tragédie planétaire.

L'humour du réalisateur parsème le film, notamment avec le groupe de bourgeoises, toutes pâmées devant le beau Roy Dupuis qu'elles vont rejoindre en gloussant sur des vélos qui s'accordent tous à leur toilette soignée. Un contraste séduisant avec le groupe de punks, dans lequel on découvre le personnage d'Émile Schneider, tatouage « ACAB » au torse. C'est là qu'on retrouve Robert FusilFrançois Pinet-Forcier de son vrai nom, membre du feu groupe Mise en demeure et fils d'André Forcier, qui cosigne le scénario avec son père et son frère, Renaud Pinet-Forcier. De la musique au dumpster diving, c'est toute la philosophie punk qui se joint à l'histoire d'Albert et de Marie-Victorin, appelé bien souvent par son vrai nom, Conrad, dans le film. Les fleurs oubliées, c'est une histoire de famille, puisque même le bébé de Robert Fusil tient un rôle dans le long métrage (et offre d'ailleurs un savoureux comic relief à bien des occasions).

À tout ce beau monde s'ajoutent une avocate (Christine Beaulieu), qui découvre un mode de vie bien différent auprès d'Albert, ainsi qu'un policier (Louis Champagne), qui enquête du mieux de ses exécrables compétences sur les incendies qui ravagent les champs transgéniques à travers la province. Cette multitude de personnages, qui se rejoignent tous par moments, conduit à quelques scènes en finale qui s'étirent un tantinet, puisque chacun a droit à sa propre conclusion. Une bien minime faiblesse dans un film à la signature visuelle si soignée, au jeu d'acteur parfois théâtral auquel nous a habitués Forcier et, surtout, au propos si actuel.

Pour reprendre les mots de Pascale Montpetit, qui a crié depuis la foule à la fin de la projection, « ce qui est radical, c’est la beauté ».

Les fleurs oubliées prendra l'affiche le 25 octobre. Pour voir la bande-annonce, c'est ici.

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Crédit: Serge Cloutier

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