Patricia Chica est plus qu'une réalisatrice, c'est une raconteuse d'histoires. Un talent prononcé pour l'image, une prédisposition à mettre en lumière les tourmentes sombres de l'individu. Elle roule sa bosse depuis quelques années jusqu'au jour où Hollywood la remarque et fait appel à son savoir-faire pour réaliser un thriller en juillet 2014.
Vendredi le 2 mai elle présente en exclusivité son dernier film avant de s'envoler pour le Festival de Cannes. Rencontre avec cette artiste, symbole de persévérance, qui prouve qu'on arrive à ce qu'on veut lorsqu'on y croit vraiment.
Raconte-nous comment tu en es arrivée à vendre ton condo pour financer ta carrière de cinéaste...
Au cours de ces dernières années, toutes mes demandes de financement cinématographique ont été refusées. Lors du développement de mon film Ceramic Tango, j’ai décidé de foncer dans la production malgré tout parce que je ressentais un sentiment plus fort que moi: celui de raconter une histoire et soutenir la cause de sensibilisation au VIH.
Grâce à une équipe dévouée et des commanditaires qui croyaient en mon projet, j’ai réussi à tourner le film. Néanmoins, afin de pouvoir le finaliser et subvenir à mes besoins durant la post-production, j’ai dû puiser dans mes économies, utiliser mes cartes de crédit et fonds de retraite. Jusqu'au jour où je n’ai même plus eu d’argent pour assumer le quotidien! Il ne me restait alors qu'une option: vendre mon condo pour me sortir de la crise.
Ceci dit, je suis très reconnaissante de toute l’aide que j’ai reçue de la part de mes acteurs, mon équipe et mes partenaires. Sans leur soutien, tout cela n’aurait jamais été possible.
Tes films traitent de sujets parfois difficiles, et souvent liés à la tourmente émotionnelle de l’individu. Pourquoi ?
J’aime croire que ma mission dans la vie est d’aider les gens à retrouver un certain salut grâce au cinéma. C’est pourquoi mes films présentent des personnages souvent pris dans des situations difficiles mais qui, grâce à leur courage et leur détermination, parviennent à trouver une force de résistance. J’aime traiter le côté sombre de l’expérience humaine dans le but d’en faire ressortir la lumière, la poésie et la transformation positive du protagoniste.
Pour Ceramic Tango, maintes fois primé à travers le monde, tu as fait appel à deux acteurs novices. Pourquoi cette démarche et comment ça s’est passé ?
Depuis le début de ma carrière, j’ai toujours travaillé avec des acteurs professionnels. Toutefois, Ceramic Tango n’ayant pas été financé, je n'avais malheureusement pas les moyens de payer mon équipe. J’avais également le profond désir de valoriser artistiquement et professionnellement Richard Cardinal et Holy Scar parce que je croyais en leur potentiel brut. J'ai pris un chemin risqué et non-conventionnel en m’associant à deux acteurs sans expérience, mais le défi que cela représentait me stimulait énormément.
Le résultat a dépassé mes attentes, j'en avais le souffle coupé! Ils s'abandonnaient à moi et, de mon côté, je me dédiais entièrement à leur émancipation. J’ai été très inspirée par la confiance et le dévouement inconditionnels que Richard et Holy me témoignaient tout au long du processus.
Ce fut une expérience hautement révélatrice pour nous trois, qui, en plus de nous unir, nous transforma humainement. Holy Scar est celui pour qui ce processus de jeu fut le plus thérapeutique. Cela a changé sa vie puisque grâce à ce film, il a pu affronter des blocages émotionnels profonds remontant à son enfance.
En janvier dernier, ton film Ceramic Tango a remporté le prix du meilleur film au Shockfest Film Festival d’Hollywood, puis tu a été recrutée pour réaliser ton premier long métrage aux côtés, entre autres, de Michael Biehn. Comment ça s’est passé ?
Le succès de Ceramic Tango dans le circuit des festivals internationaux m’a ouvert beaucoup de portes, surtout dans le milieu du cinéma de genre américain.
Après avoir participé à l'un des panels de la Fan Expo (organisé par Anchor Bay) aux côtés des Soska Twins, et après avoir gagné le prix du meilleur film au Shockfest Film Festival, la compagnie de production de Michael Biehn (The Terminator, Aliens) et Jennifer Blanc (Dark Angel) m’a recrutée pour réaliser deux thrillers. Le premier que je réaliserai est écrit par Barbara Stepansky (gagnante du prestigieux prix Nichol Fellowship de l’Academy of Motion Pictures). J’adore le scénario! C'est un grand honneur pour moi de commencer à travailler avec des artistes que j’admirais déjà professionnellement.
Vendredi le 2 mai aura lieu la soirée de lancement officiel de ton nouveau film Serpent’s Lullaby, que réserves-tu à tes invités ?
J’ai toujours voulu offrir à mon public l'immersion dans l’univers de mes films à travers d’autres médias (arts de la scène, burlesque, humour, musique). Le 2 mai prochain, les artistes ayant participé au film monteront sur scène pour présenter un spectacle vaguement inspiré du film.
Les actrices Jenimay Walker et Annabella Hart, ainsi que la deuxième assistante-réalisatrice Jennifer Guillet, l’humoriste irrévérencieux Dan Derkson et l’artiste hip hop, Statch, offriront des performances après la projection du film afin de faire perdurer l’expérience au-delà de l’écran. On vous réserve aussi d’autres surprises !
Vous êtes tous invités à assister au lancement du plus récent film de Patricia Chica, Serpent’s Lullaby, qui se tiendra vendredi le 2 mai. À noter que le court métrage sera présenté au Festival de Cannes dans le cadre du Short Film Corner, dès le 13 mai.
Collaboration spéciale: Audrey Barbier
Crédit photo: JC Orozco / Page Facebook officielle de Patricia Chica
