Noémie Yelle nous jase de la websérie lesbienne Féminin/Féminin – Entrevue exclusive HollywoodPQ
Karine ParadisNoémie Yelle est d’une simplicité désarmante. Lorsqu’elle vous parle, elle vous regarde droit dans les yeux. Elle est calme, souriante et totalement charmante. Elle est vraie.
On est chanceuse, la belle est venue faire un tour dans les bureaux de HollywoodPQ la semaine dernière pour nous parler de son rôle kick-ass de Léa dans notre nouvelle série coup de coeur Féminin/Féminin (la saison 1 est disponible juste ici)! Oui, LA nouvelle websérie lesbienne pour tout le monde de la réalisatrice Chloé Robichaud qui fait tant jaser un peu partout sur la planète.
Noémie Yelle nous avait marqué dans Elles étaient cinq, fait rire dans Ramdam, et aujourd’hui, elle représente un nouveau modèle positif pour la communauté lesbienne. Thumbs up!
Une scène nous a vraiment fait rire dans la Féminin/Féminin, qu’on entend aussi très souvent: « Catherine Renaud dans Mémoires Vives, elle joue tellement bien la lesbienne… Sais-tu si elle est lesbienne pour vrai? » On te confirme que tu joues vraiment bien « la lesbienne » dans la série, est-ce qu’on te pose la question souvent toi aussi?
Non, pas encore (rires)! Mais je trouverais ça flatteur que quelqu’un dise: « T’es tellement bonne, j’en reviens pas que tu sois hétéro! ». Je me dirais: « Oh mon Dieu, c’est le plus beau compliment du monde! » Mais c’est sûr que lorsque je vais aux soirées Où sont les femmes organisées par Lez Spread The Word, parfois je me dis: « Ah, peut-être qu’elle, elle pense que je suis lesbienne? » parce que je suis une fille dans une soirée de lesbiennes, alors il y a des chances que je le sois. Mais c’est surtout moi qui se pose des questions… on ne m’en pose pas!
On t’a vue dans Ramdam et tu étais un modèle pour les jeunes et là tu joues dans Féminin/Féminin et tu représentes un nouveau modèle positif pour la communauté lesbienne. On se prépare comment à jouer des rôles avec un tel impact?
Mon Dieu, je ne me suis tellement pas posé ces questions-là… quand on accepte un rôle, je pense qu’à la base, c’est un choix un peu égoïste. Le personnage est venu me chercher et je me suis dit: « Wow! Ça me tente de jouer ça! » Mais on dirait que je ne me demande jamais quel impact mon rôle va avoir sur les gens.
Le succès de Ramdam, à un moment donné, c’était presque démesuré. Ça n’avait pas de bon sens, on était comme des rockstars! Je ne sais pas quoi vous répondre… c’est flatteur et c’est le fun pour moi, la comédienne, de jouer dans des zones aussi différentes. J’ai joué les ados dans un public plus jeune et là, en ce moment, je suis vraiment ailleurs: mais c’est super de diversifier mes rôles. Je travaille très instinctivement, tout comme Chloé Robichaud.
Dans la série, tu es pas mal l’une des seules qui a eu à tourner une scène d’amour (avec la comédienne Carla Turcotte). Est-ce que ça te faisais peur lors que tu as lu le script?
Oui, mais pas de jouer avec une fille. Mon seul souci était que ça ait l’air vrai! On a fait tellement de fois la scène, et j’avais dit à Chloé que ça me stressait cette scène-là… mais j’aurais été stressée avec un gars aussi. À la limite, ça me stressait moins avec une fille, parce qu’il n’y a pas de charme, c’est sûr qu’il n’y aura rien avec elle: c’est vraiment mon amie Carla Turcotte et on le sait, donc il n’y avait pas de petits jeux de séduction. Mais je voulais tellement qu’on y croit qu’elles s’aiment, alors on a tourné la scène plusieurs fois pour se dégêner et après on a commencé à tourner réellement lorsqu’on était sûre.
On peut lire partout « qu’enfin il y a de la vie après The L Word », que Féminin/Féminin est plus réaliste que The L Word… on s’entend que c’est tout un honneur de se faire comparer à cette série culte, LA série lesbienne par excellence!
Shame on me, je n’ai pas encore regardé The L Word, mais promis je vais le faire! On dirait que d’être comparé à une si grosse série qui a marqué tant de gens, je suis un peu dans le déni, je me dis: « Oui, oui… » C’est plus réaliste, parce que The L Word c’était vraiment glam, une vie que 0,001% des filles peuvent avoir. Tandis que Féminin/Féminin, c’est vraiment n’importe quelle montréalaise qui peut vivre ça! On se fait comparer parce que c’est l’autre show lesbienne dans le monde…
Jusqu’à quel point te reconnais-tu en ton personnage Léa?
Léa a un côté bubbly que je peux avoir moi aussi dans la vie. Ceci dit, côté amour on est vraiment différente: elle a eu très mal et elle a peur de l’engagement! Par contre, c’est à elle que ses amies filles vont se confier et on a ça en commun: j’aime ça aller prendre des cafés le matin et parler de tout et de rien. En même temps Léa a un côté très égocentrique et centré sur elle-même que je n’ai pas du tout! On a nos similitudes comme nos différences. Question style, on et pas mal différente. Léa est plus masculine que moi dans la vraie vie: plus boyish, jeans skinny et t-shirt ample avec une tuque!
Qu’est-ce que tu dirais aux gens homophobes pour leur faire comprendre que les préjugés envers les gais et lesbiennes sont non fondés et qu’il faut en finir avec ces opinions fermées?
J’ai vraiment de la misère avec ça, comme j’ai du mal avec le racisme… je suis très intolérante parce qu’on est tous pareils et en même temps on est tous différents à différents niveaux. Je ne comprends pas que ce que tu fasses dans ton lit puisse intéresser les autres d’une quelconque façon. Je suis très impatiente et intolérante face à l’homophobie et je trouve ça triste, je ne comprends pas, l’intimidation qui en découle de ça en 2014. J’ai une amie qui a deux enfants et qui est avec une fille, c’est son amoureuse, et mes enfants trouvent ça normal. Je vais être super sévère si un jour mes enfants sont homophobes, je pense que ça ne se peut pas qu’ils soient homophobes, mais si un jour ils intimident d’une quelconque façon quelqu’un d’autre, je ne serai vraiment pas contente.
Travailler avec Chloé Robichaud, pour qui tu as beaucoup d’admiration, c’est comment?
Un charme! J’aimais son oeuvre. Maintenant je la considère comme une amie et j’ai encore plus d’admiration pour elle: c’est quelqu’un d’extrêmement sensible et à l’écoute des autres. Elle comprend quel genre de personne on est très rapidement, ce qui aide à mieux nous diriger chacun d’entre nous d’une manière différente et personnelle. Ça m’impressionne réellement et je trouve ça extraordinaire. J’aimerais beaucoup retravailler avec elle!
Vous avez passé le cap des 300 000 visionnements en trois semaines seulement, 300 000 curieux un peu partout sur la planète et ça monte toujours… qu’est-ce qui justifie ce succès d’après toi?
La simplicité à la fois du propos et de sa marginalité. Dans le sens que c’est rare qu’on fait vraiment un projet où on ne parle que de la réalité homosexuelle. Et en même temps c’est tellement traité avec simplicité: ce sont des problématiques quotidiennes que les filles vivent, qu’on vit peu importe si on est hétéro ou homosexuel. Donc ça touche tout le monde, peu importe l’orientation sexuelle. En même temps les images sont tellement belles, bien traitées, c’est beau à regarder, c’est bon et bien réalisé!
On ne s’attendait jamais à ça lorsqu’on a lancé le pilote, Chloé avait en tête un chiffre (20 000) et juste le pilote a eu 100 000 visionnements… on s’est dit WOW! Évidemment, on a fait ce projet commun pour qu’il soit vu et c’est super que ça touche les gens.
On veut une saison 2, on a besoin d’une saison 2… va-t-il y avoir une saison 2 de Féminin/Féminin?
Moi c’est sûr que j’embarque s’il y a une saison 2, tout comme n’importe quel projet que me proposerait Chloé: c’est trop le fun travailler avec elle et elle a beaucoup de talent! On vient de tourner au mois d’avril la saison 1, alors c’est encore trop tôt pour se prononcer… C’est dispendieux aussi, avec la totalité des épisodes, on a tourné un long-métrage avec rien! S’il y avait une saison 2, on le saurait peut-être à l’hiver prochain.
C’est comment tourner dans une série 100% féminine, où il n’y a pas l’ombre d’un gars?
On dirait que plus je vieillis, plus je m’entoure de filles: mes meilleures amies sont des filles, tandis que lorsque j’étais ado, je me tenais plus avec des gars. Donc pour moi ça fait du bien, surtout quand ce moment les filles, on est un peu sous-exposées alors d’avoir un projet comme ça où les filles sont vraiment mises en valeur, c’est génial.
Une gang de filles ensemble, est-ce que vous vous êtes jouées des tours entre les prises? On a vu une photo de toi qui dormais sur le plateau de tournage…
Je suis clairement la dormeuse. Après l’épisode du chalet, tout le monde est allé prendre une bière et moi je me disais: « Ah je suis tellement fatiguée, je vais aller me coucher… » On avait une journée de tournage ailleurs, où on dormait à l’hôtel, et moi je pensais juste à être en forme le lendemain! Vraiment matante, j’étais fatiguée et je voulais dormir. Je suis pas mal cocooning dans la vie.
Il est tellement arrivé de choses qu’on dirait que je n’ai pas d’exemple… on dirait qu’un plateau de filles c’est vraiment discipliné (rires)! On était vraiment à notre affaire. C’est sûr qu’on a ri et qu’on a bafouillé, il y a eu des bloopers en masse, mais c’est tout.
Oui, vraiment. J’espère que ça va sortir sur DVD… Je n’arrête pas de les gosser pour voir les bloopers où on rit! Je pourrai juste regarder ça! Souvent je me retrouve sur YouTube à en regarder, je connais ceux de la série Le coeur a ses raisons par COEUR: ça me fait rire encore même si je sais quel est le punch.
Féminin/Féminin est la première websérie à exploiter la réalité des lesbiennes au quotidien. Est-ce par manque d’intérêt ou parce que l’univers des lesbiennes est encore considéré comme tabou que le sujet n’a pas encore été abordé à l’écran?
Je ne pense pas que ça ne soit pas intéressant, je crois que lorsque quelqu’un écrit une série, il veut que ça touche le plus de monde possible et comme ce n’est pas la majorité des gens qui sont homosexuels, on n’a pas tendance à faire du protagoniste un homosexuel. Parce que ça va moins toucher les gens. Je pense aussi qu’il y a une part ou c’est encore trop tabou: il y a des gens autour de moi qui ne se considèrent pas comme homophobes et qui sont complètement ouverts et qui ont fait: « Ah ouais? On dirait que je n’étais pas habitué, ça ne m’a pas choqué… mais je n’étais pas habitué! » Et ça m’a surpris! Tant mieux si ça peut mettre en lumière que nous sommes tous pareils. Moi quand j’ai regardé le produit final, c’était comme si je regardais des couples hétérosexuels.
Quels sont tes projets pour l’été?
J’ai commencé le tournage d’une nouvelle série, qui s’appelle Au secours de Béatrice et on vient de terminer le bloc 1 et on va commencer le bloc 2 au début du moins d’août! Sinon j’avais un petit rôle dans Les beaux malaises qui revient. J’ai tourné une série web qui va s’appeler Papa d’estrades, qui va sortir à l’automne: ça parle d’un père de famille qui est assez compétitif et qui pousse ses enfants, il n’est vraiment pas politically correct! C’était vraiment drôle à faire!
Sinon c’est direction chalet (j’emprunte celui d’une amie), tranquille avec mes enfants et on va se baigner dans le lac!
Vous pouvez voir le pilote de Féminin/Féminin juste ici et regarder toute la saison 1 sur le site femininfeminin.com! Un GROS merci à Noémie pour son temps.
Crédit photo et entrevue: Karine Paradis